Il était une fois Halloween
Il était une fois une fête que peu de monde célébrait encore. Elle se déroulait dans la nuit du 31 octobre, là où les monstres et les fantômes s’octroient le droit de descendre dans les rues, sans craindre d’être suspectés de vouloir du mal à quelqu’un.
En ce jour d’Halloween 2025, une étrange créature fantastique sortit de son trou. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas respiré l’air pur de cette nuit pleine de vérité, au sujet de la mort et des esprits pas vraiment saints qui parcourent la morne pleine de cette vieille région abandonné des hommes. Mais saurez-vous la reconnaître?
Ce récit se déroule en pleine campagne française, entre la montagne dorée au soleil d’automne et les fleurs des champs coupées par la moissonneuse batteuse du temps passé. Pourtant le chrysanthème restait roi en cette fin d’octobre, car il ornait de toute sa splendeur les tombes de nos très chers disparus.
La tradition voulait qu’en cette douce matinée d’Halloween, les jeunes enfants préparent déjà minutieusement leurs seaux, pour récolter le plus de friandises possibles avant la fin de la nuit. Les déguisements se mélangeraient ensuite joyeusement avec la réalité dès la tombée du jour, car il ne faut pas oublier que certaines créatures se promènent parmi les hommes ces soirs-là. Elles profitent de l’ambiance électrique et chargée de mystère qui se propage d’une rue à l’autre dans les villes et les villages. Les fantômes se servant de cette confusion annuelle pour hanter à nouveau les vieux manoirs laissés à l’abandon, tandis que les monstres aux dents acérés croquaient les jambes coincées dans les caniveaux de la vie ordinaire. Mais depuis quelques temps cette fête devenait peu agréable, sous l’emprise d’un sort quelconque que cette année allait essayer de rompre.
Intéressons-nous plus particulièrement au troisième étage de cet immeuble froid et sans âme, où une troupe d’écoliers bavards avait décidé de mettre le bazar dans la ville. Ils étaient prêts à en découdre avec tous ceux qui voulaient les empêcher de perpétrer leur méfaits. Se sentant sans doute autorisés à le faire, par un laisser aller général dans ce quartier de la cité pittoresque où nous nous trouvons. Les parents étaient épuisés de courir après leurs bambins devenus grands, pour qu’ils fassent leurs devoirs ou encore rangent leur chambre dédiée à l’horreur du mirage d’une vie imposée par la société. Mais ce soir ils seraient tranquilles, laissant leur progéniture imposer un malheur des plus réussit et à un rythme impressionnant qui toucherait beaucoup de gens. En effet ils n’étaient pas seuls, car dans d’autres villes comme celle-ci, beaucoup de groupes d’enfants allant de dix à vingt ans se préparaient à marcher sur les trottoirs pour effrayer leurs semblables.
Mais étaient-ils tous leur semblables ?
C’est ce que nous n’allons pas tarder à découvrir !
Le décor était idéal avec ces vielles chaussées pavées qui s’humidifiaient sous l’insistance du brouillard automnal. Elles devenaient aussi glissantes que la peur elle même. Cette sensation d’angoisse dans les rues semblait pouvoir intervertir les peurs à tout moment. Nos groupes de jeunes parés au combat de la folie en ce soir d’Halloween, sentaient quand même que quelque chose d’étrange montait en eux. Mais ce sentiment disparu vite fait lorsqu’ils rencontrèrent une autre bande déguisée en toutes les stars de ces nuits de l’horreur au cinema. Ils se lièrent d’amitié au son du canon à bonbon qui envoyait mil et une friandises d’une maison à l’autre.
Les gens toléraient cet événement, car il permettait à la jeunesse de se défouler pensaient-ils. Alors que souvent la nuit du nouvel an part également en feu pour aider les jeunes à se défouler. Mais peu importe la raison, cette nuit allait devenir de plus en plus étrange.
Apparaissant difficilement dans le brouillard un nouveau groupe se joignit à nos férus de films et de musiques horripilantes honorant la peur à son paroxysme. Cette troupe là n’était pas grimée de manière conventionnelle, ils avaient tous des cornes sur la tête et un pustule sur le nez, comme si des sorcières s’étaient amourachés d’un bouc pour en faire une progéniture digne des nuits de ce type. Notre équipe de jeunes, très sûre d’elle, les accueillit avec le sourire, tout en leur proposant de s’allier pour semer la terreur et l’angoisse dans les allées des maisons qui se présenteraient à eux. Et c’est ce qu’ils firent, détruisant sans remords les chrysanthèmes. Ces symboles colorés qui bordent les allées du souvenir, car chaque lendemain d’Halloween est toujours dédié à ceux que nous aimions côtoyer de leur vivant. Il ne faut cependant jamais négliger que le trente-et-un octobre permet aux morts oubliés des leurs, de se rappeler au bon souvenir de leur existence. Et ce soir là cette phrase prit toute son importance.
Notre groupe de délinquants juvénile et autorisé par leur propre conception de la fête à tout détruire, s’arrêta devant une maison. D’énormes citrouilles décoraient cet élégant pavillon, certaines étant sculptés d’un sourire édenté et une petite fleur de chrysanthème ornait leur chapeau. La longue allée qui menait au porche invitait les petits monstres sympathiques à venir toquer à la porte pour recevoir la plus merveilleuse des friandises. Mais quelle allait être celle destinée à notre bande de casseur, dont la lunette bien trop étroite ne leur permettait pas de comprendre ce que le mot demander voulait dire.
Ils empruntèrent le petit chemin gravillonné et montèrent, au moins à une vingtaine, sur le porche. Puis ils frappèrent violemment sur cette pauvre porte d’entrée, qui ne désirait pourtant que de s’ouvrir, pour récompenser les beaux costumes originaux fabriqués avec amour.
Notre troupeau de malotru était fier de sa force d’attaque, en effrayant ainsi les gens qui vivaient ici. Mais étrangement la porte s’ouvrît. Les habitants n’avaient à priori pas peur de se retrouver en fort mauvaise posture, face à cette étrange flopée de monstres qui les invectivaient de leurs grimace pas vraiment joyeuses.
Une femme vêtue de blanc, de rouge et de mauve ouvrit la porte. Elle tenait en ses mains une petite boite remplie de bonbons acidulés. Ils étaient plus beaux les uns que les autres, brillant d’un éclat presque suspect pour être aussi magnifiques et appétissants. La troupe complètement désordonnée se jeta sur ce précieux butin, sans même solliciter l’aide de la dame afin de les répartir tranquillement entre chacun d’entre eux. C’est comme s’ils étaient en train de dévaliser une banque, dont le trésor serait aussi précieux q’une machine à fabriquer du bonheur. Car en effet, comment décrire autrement cette scène, qu’une envie folle de redevenir un enfant pour s’émerveiller du gout acidulé d’un bonbon offert en bonne amitié. Mais là nous assistions plus à une agression, et dans leur empressement ils firent tomber la pauvre femme sur le sol. Elle était à moitié étouffée par cette bande de malandrins assoiffés de sucre et de beauté devant ces belles friandises. Heureusement elle ne fut pas blessée, mais aucun de ces malotrus ne prit la peine de l’aider à se relever. Seul ses petit bras tout fins réussirent à la soulever pour ne plus être piétinée de ces horribles pas de l’infortune à son égard.
Elle observa néanmoins la scène, désormais adossée contre le mur qui séparait sa petit entrée de son séjour délicat. Elle pensait ainsi les empêcher de pénétrer dans la maison. Mais rien n’y faisait, ils envahissaient maintenant sa cuisine pour chercher d’autres merveilleux bonbons, si addictifs à présent qu’ils en voulaient toujours plus. Elle leur donna tout ce qu’elle avait en stock et les supplia de partir.
C’est ce qu’ils firent finalement et de la plus simple des manières en tournant les talons sans merci ni au revoir, laissant la femme seule avec son désespoir. En prenant l’allée dans l’autre sens, ils en profitèrent également pour donner de multiples coups de pieds dans les citrouilles et piétiner les fleurs de chrysanthèmes sans aucune compassion pour leur beauté merveilleuse à elles aussi.
Mais ce qu’ils n’avaient pas vu après leur départ et leurs derniers méfaits, c’est que la propriétaire des lieux se rendit calmement vers son petit patio, à l’arrière de sa maison. C’est là qu’elle fabriquait les bonbons pour les offrir aux petites âmes rigolotes, qui venaient la chatouiller de leurs blagues légères et amicales les soirs d’Halloween. Mais curieusement elle faisait toujours une fournée spéciale pour les mauvaises âmes. Celle qui n’ont pas besoin de déguisement pour faire paraître la noirceur de leurs intentions. Et ces gaillards elle les avaient déjà vu, lorsque de leur rage dévastatrice ils dévalisèrent le rayon bonbons du supermarché sans même passer par la caisse. Personne n’osait leur dire quoi que ce soit. Ils avaient tous peur d’eux, craignant des représailles violentes si une limite quelconque était mise à leur folie destructrice.
Ainsi sans personne pour les arrêter, ce groupe de malfrat d’Halloween poursuivait son chemin. Ils arrivaient à présent au sommet de la petite colline qui surplombe la ville. Ce petit bourg où ils résidaient pourtant en paix, bien à l’abris sous leur couette, dans ce foyer de l’indifférence qui les logeait et les nourrissait de leur plein gré. Fatigués par cette folle nuit de terreur à insuffler aux habitants, il s’assirent entre les arbres millénaires de la forêt du levant qui se tenait par ici. Une partie du groupe se mit à déchirer ses costumes pour mieux se reconnaître et rire de leurs méfaits ensemble. Ils se gaussaient d’être des terreurs et de pouvoir ainsi terroriser une ville sans même qu’ils ne puissent la voir s’effondrer. Personne ne leur disait non et encore moins les pontes de l’éducation, qui les trouvait plutôt menaçant avec leur langage grossier à la moindre tentative pour les raisonner. Ils ne se déplaçaient que rarement seul, leur cri de ralliement étant la trompette de l’infortune, car chacun de leur pas d’Halloween se transformait en réalité quotidienne pour les habitants.
Mais cette nuit allait marquer un grand tournant. En effet il était à constater qu’une partie de ce petit groupe de terreur ne voulut pas se défausser de ses habits de fête. Au contraire ils piquaient de leurs cornes les fesses de ceux qui désiraient à présent discuter tranquillement, sans être embêté par qui que ce soit. C’est pour cela qu’ils s’étaient installés là haut, sur ce monticule de terre artificielle, ce cimetière qui ne les effrayaient nullement.
-Arrêtez ! Hurlait le plus jeune de la bande des voyous
-Vous n’êtes plus drôle ! Renchérissait un deuxième.
Mais cette sarabande étrange ne cessa pas, les cornus n’arrêtant pas de titiller le popotin des voyous de la première heure. Ils les obligèrent à ce lever, les faisants danser autour des tombes de l’année dernière. Et ce qui dut arriver, arriva. Une dizaine de mort se réveillèrent de leur long sommeil, ils n’avaient pas pu s’élever vers d’autres cieux, car leur âme était trop occupée à comprendre leur situation de cadavre. Un des jeunes malfrats tenta vainement d’arracher les cornes de la tête d’un des membres du petit groupe, rencontré au coin de la rue. Ainsi à leur tour ils commencèrent à avoir peur, ne sachant plus vraiment quoi faire pour se sortir de ce mauvais pas.
Ils étaient cernés par les fantômes des morts intrigués par ce réveil soudain les empêchant de quitter le cimetière et par les cornus, qui les forçaient à danser autour des tombes. Le jour allait sûrement les sauver de leur misère, mais le soleil ne se levait pas, comme si le temps avait stoppé sa course en cette belle nuit étoilée d’Halloween.
-Au secours ! Hurlaient-ils en coeur. Au secours, venez nous aidez !
Mais personne ne les entendis, car leurs voix s’entremêlaient au vent de la peur qu’ils avaient instillé dans leur belle petite ville. Cette cité pourtant pleine d’attention, pour ses jeunes enfants et adolescents en voie de devenir des adultes responsables de leur sort.
Cependant une autre étrangeté se produisit. Une pétale de chrysanthème, restée coincée dans la chaussure d’un des casseurs de citrouilles, se posa délicatement sur le nez d’un fantôme, perplexe à côté de sa tombe. L’esprit hanté par la peur de mourir s’évanouit en un instant. C'est comme s’il venait de trouver le chemin pour une autre vie, bien plus plaisante que sa condition actuelle en train d’errer entre deux mondes.
Les jeunes se mirent à la recherche de fleurs de chrysanthème pour se débarrasser des monstres, mais malheureusement pour eux ils en avaient détruit la plupart pour nuire aux gens, sans vraiment comprendre pourquoi. A présent ils savaient qu’ils voulaient échapper à la mort et ils avaient très peur. Si peur que certain s’urinèrent dessus devant le rire sarcastique du groupe de démon aux cornes pointues. Ce soir ils avaient trouvé plus fort qu’eux : des êtres vils, dont la laideur de l’âme ne faisait que renforcer la terreur qu’ils donnaient en échange de leur bon vouloir de gredins éternels. Mais vous vous doutez bien qu’ils n’étaient pas là par hasard ! C’est l’esprit d’Halloween lui-même qui les avait envoyé à la rencontre de nos vilains garnements.
La légende n’en pouvait plus de ces horribles personnages qui pensaient devoir terrifier la population au point de ne jamais s’arrêter d’une saison à l’autre. Il était temps de remettre des limites dans ce monde. Et tout débuta en ce 31 octobre 2025, où toutes les belles histoires pouvaient enfin reprendre leur place sur cette magnifique planète. Et pas uniquement celles qui font peur à l’excès, sans jamais cesser leur emprise sur les bonnes âmes. Voici donc comment cette belle dame habillée de blanc, de rouge et de mauve mit un terme aux agissements des ennemis de toutes les autres belles histoires, qui égayent la vie des gens durant toute leur existence.
Il était temps que la folle journée du méfait sans limite cesse, pour que le Saint Nicolas, le Père Noël et toutes les autres créatures qui parcourent notre beau patrimoine légendaire puissent reprendre vie à leur tour.
Il était temps que le cirque de la violence gratuite cesse. Et pour cela la fête d’Halloween avait employé les grands moyens en envoyant ses monstres les plus féroces. Car ces derniers ne s’avouent jamais vaincus devant une bande d’ignorant, en les sacrifiant à l’incertitude même de leur bêtise et de leur inintelligence. En effet lorsque l’éducation du coeur cesse d’être donnée en partage à travers les plus belles histoires de fées, de princesses et d’autres mondes fantastiques, il n’y a plus rien de merveilleux à vivre dans le monde.
Et notre belle fête du bonbon resplendissant voulut ainsi remettre un point d’honneur à ce que toutes les autres légendes puissent elle aussi revivre, sans être prises pour des inepties. Pourquoi seule la peur aurait-elle le droit d’exister, alors que la beauté d’une robe de mariage d’une princesse est tout aussi salvatrice que le sourire ravageur du prince charmant qui l’accompagne dans ses aventures.
Voilà pour cette belle histoire dont le chrysanthème viendra toujours à couronner la fin de l’errance pour les âmes. Celles qui se pensaient ainsi éternelle, à toujours vouloir faire perdurer la mort dans leur existence si joyeuse, lorsque la lumière de la Noël vient éclairer les sombres nuits de l’hiver qui arrive à grand pas.
Joyeuse fête d’Halloween et n’oubliez pas d’illuminer vos allées pour donner le bonbon du réconfort, et non celui qui fait perdurer la peur dans votre existence.
Ah oui et pour nos vilains garnements, ils reprirent le chemin des études, pour apprendre que la vérité ne se trouve pas dans les yeux de la peur qu’ils infligeaient à leur victimes, mais dans le bonheur d’apprendre à vivre ensemble du même et unique bonbon. Celui de l’amour pour l’humanité, lorsqu’elle n’est point obligée de se plier au chantage de la folie, afin d’expérimenter les plus belles aventures qu’une vie peu offrir. Et ce n’est sûrement pas de faire peur aux autres pour mieux les dominer de sa propre peur, de n’être plus rien à la fin de la journée.