Mary et la liberté

En ce jour de Novembre, Mary venait de fêter ses 25 ans. Sa mère d’origine française pourtant aimante et pensant la faire sourire, lui offrit un chapeau de catherinette. Mary était conscience qu’elle n’avait pas de petit ami, et elle ne risquait pas de l’oublier car chaque membre de la famille le lui rappelait régulièrement. Les fêtes de fin d’années approchaient et elle redoutait le réveillon assise entre tante Dana et Tante Flavie. Ces dernières ne manqueraient surement pas de ramener leur porte-folio virtuel des plus beaux célibataires en vue sur Facebook, Instagram et autre application ou blog à la mode.

Mary poussa un grand soupir et son chapeau de feutre aux multiples fleurs séchées se cala sur sa tête. Elle réfléchissait calmement et constatait qu’elle n’avait rien contre les hommes et qu’elle désirait en rencontrer un, mais elle tenait à sa liberté. Pour sa famille on ne peux plus classique et conformiste, qu’elle ne critiquait nullement, un fiancé devait assurer sécurité et confort pour sa promise et pourvoir une dot conséquente le jour des épousailles. Dans la continuité du mariage devait s’en suivre un ,deux ou trois enfants voir plus si affinités et taux de fécondité!

Mary ne voulait pas d’un avenir tracé, ni pour elle, ni pour son futur compagnon et ni pour son hypothétique progéniture.

Elle embrassa sa mère sur le front et remercia son père pour la traditionnelle gaufre d’anniversaire aux trois chocolats. Elle enfila son manteau et s’emmitoufla dans son écharpe blanche avant d’ouvrir la lourde porte d’entrée en bois massif. Mary dévala les marches de la maison parentale et mitoyenne de la vieille cité de Brooklyn et sauta dans le premier bus en direction de Manhattan.

Puisqu’elle désirait la liberté, elle allait lui rendre visite aujourd’hui et y faire un voeux. Elle se rendit à la gare maritime et monta dans le premier ferry en direction de Liberty Island, en cette saison il était vide de touriste.

Assise à l’étage, en proie au vent froid, elle appréciait cette solitude loin du tumulte de la ville. Elle observait les mouettes qui ne se préoccupent ni du temps qui passe ni de l’argent du loyer, c’est cela qui doit rendre leur vol plus léger se disait-elle.

Elle arriva à destination et emprunta, entourée de deux ou trois couples d’amoureux, le chemin qui menait au pieds de miss Liberty. Elle n’avait pas remarqué le jeune homme à lunette qui tout seul, sous son bonnet bleu ciel prenait la même direction qu’elle.

Mary ralentit doucement sa marche au moment d’atteindre la dame en vert. Elle était là, fière, brandissant la flamme de la liberté à travers vents et marées mais elle semblait si seule, malgré le nombre de visiteurs qui chaque année l’arpentaient de bas en haut et en faisaient inlassablement le tour.

Mais voilà Mary voulait être libre mais pas seule! Quelles concessions allaient-elle devoir faire? Elle sortit son petit carnet de note de son sac et y inscrivit les limites infranchissables pour son bien être envisagé. Du choix de sa vie amoureuse à celui de son travail tout en passant par sa liberté d’expression, cela en faisait des jalons à ne pas franchir.

Se pensant seule elle énumérait à voix haute ses désirs et ses volontés en finissant par le droit de prendre des risques en toute conscience.

« Eh ben mademoiselle, vous n’êtes pas conventionnelle » lança le jeune homme au bonnet bleu qui l’observait depuis le vieux banc non loin du sien.

« Je crois que c’est le plus beau compliment que personne ne m’ai jamais fait » répondit à son propre étonnement Mary.

Elle fit le voeux en s’étant mise au clair avec elle-même sur ses choix futurs qu’elle aurait toujours le choix de ses choix, et elle en assumerait les conséquences. Ainsi elle décidait de se lancer dans sa première prise de risque.

« Dites moi… »

« …Jasper »

« Dites moi Jasper, vous avez quelque chose de prévu pour le réveillon? »

« Euh.. Non pas pour le moment »

« Que diriez vous d’une soirée conventionnelle avec une personne non conventionnelle »

« Ma foi pourquoi pas » répondit le jeune homme en prenant Mary par le bras, non sans souligner l’originalité de son chapeau du jour, ce qui fit sourire notre catherinette.

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