Madame Plantage

Mme Plantage, comme tous les jeudis matin, se rendait tranquillement vers le marché qui se situait sur la place centrale de sa petite ville. Elle se tenait fière et droite du haut de ses 83 ans, car son fils Adrien en était le maire et elle se devait de lui faire honneur. De sa main droite l’octogénaire tirait avec vigueur son chariot de course aux motifs bariolés. Elle l’avait décoré soigneusement en s’aidant d’une technique ancestrale de coloriage où chaque numéro équivaut à une couleur. Son mari, pourtant descendant d’une famille d’artisans dans la confection vestimentaire, avait osé lui demandé d’arrêter ces enfantillages, qu’à son âge normalement le stade de la maternelle était dépassé depuis fort longtemps.

Mme Plantage, à la remarque désagréable de son cher et tendre, s’empara d’un pinceau et effectua un balayage en piqué retourné avec sa main droite, laissant une magnifique rayure noire et argentée sur le visage de son époux. Ce dernier se rendit penaud dans la salle de bain tout en grommelant jusqu’au bout du couloir, toujours surpris par le répondant de son épouse.

Alors que Mme Plantage atteignait l’entrée du marché, sa main gauche devint soudainement incontrôlable et se leva d’un coup à l’horizontal! La laisse rose qui retenait « Image » son Pitbull de trois ans venait de se tendre subitement. « Image », pourtant si sage d’habitude, grognait en direction du marchand de fromage. Il est vrai que le camembert de ce dernier partait régulièrement à la nage, mais ce n’était pas une raison suffisante pour lui en vouloir à ce point. Mme Plantage, intriguée, lâcha sa charrette et fit un tour d’horizon à 180° la main au dessus de ses yeux. Horreur, dans l’étang du jardin botanique en contre bas sur sa gauche, un Caniche en détresse se débattait. Sur le bord, sa maitresse, la vieille Colette, sourde et muette, faisait de grands geste de désespoir.

Mme plantage, d’instinct, lâcha son Pitbull, qui sauta dans l’eau et parti à la nage secourir le Caniche. De son côté l’octogénaire lançait à son tour le coussin à hémorroïde du marchand de miel, stand le plus proche de son rayon d’action, en guise de bouée de sauvetage.

Ce dernier se retrouvait projeté sur son étal, emportant  dans sa chute les précieux bocaux qui s’éclataient un à un sur le bitume. Quel carnage répétait-il sans fin, en pleurant, assis au milieu des débris gluants, ne parvenant plus à se relever car son séant collait au sol. Il vociférait contre Mme Plantage, la menaçant de dénoncer son chien pour non port de la muselière si elle ne le remboursait pas immédiatement. Mais la brave dame ne se laissait pas démonter devant un tel chantage. Elle glissa un message à l’oreille d’Image qui courut en direction de la  camionnette du boucher. Ce dernier arrivait en sauveur inespéré, proposant au marchand, qui essayait vainement de délier son derrière du sol, de récupérer le maximum du précieux élixir afin de confectionner des saucisses au miel selon une recette datant du moyen âge. Bien sûr les bénéfices seraient partagés entre les deux hommes.

Voilà une journée typique au marché pour dame Plantage et qu’elle soit appréciée ou non, chacun s’accorde à dire que c’est une sacré personnage.

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